Interview exclusive avec le tandem DPG Media Ben Jansen et Nora Vanderschrick

Ben Jansen en Nora Vanderschrick

La plus grosse opération de fusion dans le paysage média belge s’est mise en branle il y a deux ans. Depuis un an, après avoir commencé avec une régie unifiée, MEDIALAAN et de Persgroep Publishing ne font plus qu’un. Chez Magazine Media, nous avons donc pensé qu’il était grand temps de s’essayer à une évaluation. Nous nous sommes dès lors attablés avec Ben Jansen, Chief Commercial Officer, et Nora Vanderschrick, Head of Strategy, Creative & Native, pour une discussion sur les sauts quantiques en digital et l’importance des magazines pour la publicité native.

Après deux ans, quel regard posez-vous sur la fusion ?

Ben Jansen : « Ce fut sans aucun doute une bonne décision. Du point de vue de l’entreprise, nous nous devions de passer pleinement au digital et au niveau de la commercialisation aussi, il y avait d’évidentes raisons d’unir nos forces. Au départ, nous avions trois grandes ambitions en tant que régie. Primo, faire des sauts quantiques dans la commercialisation de notre inventaire numérique. Parce qu’il y avait une seule vision et que nous obtenions les outils dont nous avions besoin. Secundo, nous voulions devenir encore plus forts en matière de contenu de marque. D’une part, en unissant les différents médias. D’autre part, au travers de l’audience importante et de la qualité supérieure des données. Enfin, il était important de consolider le business actuel. C’est la complémentarité de MEDIALAAN et de Persgroep Publishing qui a conduit au succès. Pour vous donner une idée : depuis la fusion, notre audience vidéo est devenue 10 fois plus grande. »

Nora Vanderschrick : « La complémentarité des différents médias fait que nous avons pu réaliser de belles choses, tant au niveau qualitatif que quantitatif. On se retrouve en quelque sorte dans un véritable jardin de jeux. L’aspect activateur de la radio va par exemple parfaitement de pair avec la notoriété de marque que génèrent les magazines. À cause du grand nombre de médias, il se peut bien sûr qu’on perde de vue la situation d’ensemble. Nous voulons à tout prix éviter cela et nos stratèges veillent donc au grain. Ils gardent à tout moment une vue d’hélicoptère. »

Ben Jansen : « Dans le business traditionnel aussi, notre façon de travailler porte clairement ses fruits. D’une part, il y a évidemment le chiffre d’affaires réalisé, mais d’autre part, nous livrons aussi d’excellentes performances quand on les compare à celles du marché. Sur ce dernier point, nous regardons d’ailleurs, pour ce qui est du digital , du côté de Google et de Facebook. Aujourd’hui déjà, avec un daily reach de 39,8 % en ligne, nous sommes le champion local en on-line. »

Est-il aujourd’hui indispensable de commercialiser les médias en traversant les cloisonnements ?

Ben Jansen : « Nous ne nous posons pas cette question. Pour nous, ça a en tout cas été la bonne décision. Il est vrai que je constate qu’à l’étranger il naît de plus en plus de constructions qui vont dans le même sens,  artificielles ou non selon qu’il y a différents actionnaires. »

Nora Vanderschrick : « Je pense que pour nous cette décision était bien indispensable, quand on voit quelles sont nos ambitions. »

Ben Jansen : « Le grand avantage est en tout cas que nous comprenons bien mieux qu’avant comment se présente un plan de communication. Nos équipes ont l’ambition de renforcer le business de nos clients. En fait, nous sommes passés de l’expertise média à l’expertise de communication, même si j’avoue volontiers qu’il reste quelques angles morts. Je pense alors à l’impact réel du Search ou des médias sociaux. » (Le jour de l’interview, DPG Media a d’ailleurs annoncé que dorénavant, le phénomène TikTok Stien Edlund serait accompagné commercialement par la régie, ndlr.)

La fusion présente-t-elle aussi des inconvénients ?

Ben Jansen : « Je pense alors directement aux arbres et à la forêt. Il règne un tel enthousiasme et une telle créativité ici que nous ne sommes que trop heureux de nous mettre à l’œuvre avec de nouvelles idées. C’est bien, évidemment, mais nous devons rester disciplinés pour déterminer ce que nous sommes prêts à faire ou non et pour nous y conformer. En outre, j’avoue qu’opérer le changement d’une expertise média à une expertise de communication comporte aussi un risque. Il faut encore toujours bien connaître ses médias. C’est pour ça qu’il est tellement important que nous continuions à héberger d’authentiques experts dans un média spécifique, tels que Steven Van den Audenaerde et son équipe en radio, ou Mieke Berendsen et son équipe en print. »

Citez-nous un projet qui, il y a deux ans, n’aurait pas été possible.

Nora Vanderschrick : « Ce que nous avons réalisé pour Dash l’an dernier n’était pas faisable avant. P&G s’est amené avec un gros briefing sur lequel, avec notre grande offre de médias, nous avons pu parfaitement rebondir, grâce, aussi, à la collaboration des rédactions qui – disons clairement les choses –conservent toute leur indépendance. Avec ‘Share the Load’, nous avons d’abord lancé un volet ‘non branded’, dans lequel nous avons proposé différents articles rédactionnels sur l’égalité dans le ménage. Ce n’est qu’ensuite que le volet ‘branded’ a été abordé, surtout dans les magazines. »

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Comment la régie unifiée aide-t-elle à commercialiser les magazines ?

Ben Jansen : « Aucun autre média n’est aussi important pour le contenu de marque que les magazines. Plus de 30 % des revenus publicitaires des magazines découlent de diverses formules créatives. L’an dernier, nous avons enregistré une augmentation de pas moins de 78 % à ce niveau. Les magazines sont en sécurité chez DPG Media. Pour info : l’an dernier, les revenus publicitaires de Nina (le supplément du week-end ajouté au Laatste Nieuws, ndlr.) ont augmenté de quelque 12 %. Mais bon, la part des magazines dans le chiffre d’affaires global de la régie n’est que de quelques pourcents. »

La croissance émane sans doute surtout de la publicité native. N’y a-t-il pas de restriction du nombre d’actions dans un numéro ?

Ben Jansen : « Bien sûr qu’il y a un maximum. L’équilibre doit être conservé. Nous nous heurtons parfois à ces limites. Il arrive que le nombre d’actions nous pousse à prévoir plus de pages dans un numéro ou à migrer vers une prochaine édition.

Nora Vanderschrick : « Les actions en soi peuvent bien évidemment aussi prendre de l’ampleur. Prenez le case Dove. Cette fois-là, un numéro entier de Nina a été consacré à la revendication ‘Real Beauty’ de Dove. »

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Comment voyez-vous évoluer ce business ?

Nora Vanderschrick : « Nous comptons clairement maintenir la croissance des deux dernières années. Cependant, nous ne pourrons réaliser cette croissance qu’en collaborant. Avec les rédactions comme avec les annonceurs. Les rédactions nous livrent le contexte auquel nous pouvons raccrocher les annonceurs. Pour cette année, notre ambition est d’étendre le succès que nous remportons avec des magazines lifestyle comme Nina et Goed Gevoel vers, par exemple, DM Magazine. Un aspect primordial dans tout ça est la labellisation. Nous avons des accords clairs avec la rédaction à ce sujet. Le fait qu’il est clair qu’un annonceur a payé pour un contenu est profitable pour tout le monde. »

Et les revenus publicitaires globaux en magazines ?

Ben Jansen : « En 2020, nous recommencerons à croître en magazines, du fait que la part du contenu de marque est devenue si grande et ne cesse d’augmenter. Côté digital, ça reste plus compliqué pour les magazines. Il y en a très peu qui en ligne aussi enregistrent une forte audience, même si nous obtenons bel et bien de bons résultats lorsque nous diffusons du contenu magazine via HLN.be. Peut-être devrons-nous encore développer cela davantage. Il existe suffisamment d’opportunités ; nous avons tous les atouts pour les saisir. »

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